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« La première année où aucun enfant n'est mort » : Le programme communautaire d'une infirmière canadienne pour le traitement du paludisme en République démocratique du Congo

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L’année dernière, lorsque Kim Danielle Noiseux a commencé à enseigner à des agents de santé communautaire en République démocratique du Congo (RDC) comment diagnostiquer le paludisme, elle savait qu'il serait important pour ses stagiaires de pouvoir exercer leurs compétences. Mais elle était loin de se douter des répercussions que cela aurait sur sa propre santé.

« J’étais assise avec une agente de santé communautaire, Béatrice, et nous étions en train de revoir les étapes à suivre pour le dépistage du paludisme », se rappelle Noiseux, infirmière de Québec qui a récemment passé neuf mois à travailler avec Médecins Sans Frontières (MSF) dans la province du Sud-Kivu en RDC. «Je lui ai demandé de me montrer comment elle s’y prendrait pour faire le test Bioline -- une méthode standard simple pour diagnostiquer le paludisme -- et de l'essayer sur moi. Lorsque nous avons examiné les résultats, elle a dit, « Kim, c’est positif. Vous êtes atteinte de paludisme! »

 

« J'ai pu être témoin de l'efficacité de notre programme »

Recevoir un diagnostic de paludisme, c’est somme toute une mauvaise nouvelle -- non seulement il s’agit d’une maladie grave et difficile à gérer, mais le paludisme tue près d'un demi-million de personnes dans le monde chaque année, en majorité des enfants. Mais malgré tout, Noiseux était heureuse de voir de ses propres yeux que ses formations avaient un réel impact.

« Je me suis dit : bon, cela explique les maux de tête et la terrible sensation que je ressentais dernièrement, se souvient-elle, mais en même temps, j’étais si fière parce que Béatrice avait réussi à mettre en application ses nouvelles connaissances pour confirmer un cas de paludisme simple. J’ai pu être témoin de l’efficacité de notre programme ».

 

« Dès mon arrivée à Kimbi, j’ai pu constater que le paludisme y était l'un des plus importants problèmes de santé, et l’un des plus meurtriers aussi »

 

Une maladie mortelle

Le programme en question est une initiative communautaire pour le traitement du paludisme que MSF a lancée en septembre dernier à son projet Kimbi au Sud-Kivu, en réponse au nombre élevé de décès causés par le paludisme dans la région.

« Dès mon arrivée à Kimbi, j’ai pu constater que le paludisme y était l'un des plus importants problèmes de santé, et l’un des plus meurtriers aussi », a dit Noiseux. « Il a toujours figuré parmi les trois premières causes de morbidité, mais au cours des huit premiers mois de 2014, le nombre de consultations au centre de santé de MSF atteignait parfois le double de celles réalisées l'année précédente, et le nombre d'hospitalisations dues au paludisme grave était à son plus élevé depuis le début du projet. Environ 65 pour cent de tous les décès d'enfants de moins de cinq ans étaient attribuables au paludisme ».

Kim Danielle Noiseux et son collègue Amuri Mwinyi Kelvin lau lancement du programme communautaire de MSF de traitement du paludisme à Mahembe, au Sud-Kivu, en République démocratique du Congo. (Crédit photo : Kim Danielle Noiseux)
 

Rejoindre les patients avant que la maladie ne devienne trop grave

Pour les équipes médicales de MSF au Sud-Kivu, le défi consistait à rejoindre le plus possible de patients atteints de paludisme simple pour leur administrer un traitement précoce alors que la maladie est moins difficile à traiter. Autrement, les patients qui se présentent au centre de santé de MSF à Kimbi sont déjà très malades depuis des jours, ce qui augmente leur risque de décès. Le programme communautaire a donc été instauré pour permettre de diagnostiquer et de traiter le paludisme simple avant que la maladie ne devienne trop grave.

« Dans les régions éloignées des centres de santé, nous avons travaillé avec les dirigeants communautaires pour identifier des personnes capables de faire des mathématiques simples, de lire et d’écrire en français, et bénéficiant du respect et de la confiance des membres de leur communauté », dit Noiseux. « Puis, nous leur avons appris à effectuer le test diagnostique du paludisme, et à administrer le traitement dans les cas simples. En présence d’un cas grave, la directive était que nous allions payer pour une moto-taxi pour emmener le malade vers le centre de santé de MSF. Si cela était impossible, MSF allait fournir le médicament et le matériel nécessaires et permettre aux agents de santé communautaire de se déplacer pour traiter le malade sur place ».

Les résultats ont été concluants. Au cours des quatre premiers mois, le programme communautaire a permis de réaliser plus de 20 000 consultations, dont près de 80 pour cent ont mené à un diagnostic positif de paludisme. De ce nombre, seulement 0,5 pour cent des cas étaient suffisamment graves pour nécessiter une hospitalisation. « Ces consultations ont été réalisées dans des villages éloignés de la clinique, dans des régions où les gens ne se rendent jamais à l'hôpital, ou seulement s’ils sont gravement malades », dit Noiseux. « Ce sont plus de 20 000 personnes qui ont reçu une aide médicale pour une maladie mortelle et qui autrement n’auraient jamais été traitées ». Bien que le programme n’ait été mis en place que dans six collectivités, des patients en provenance d’une soixantaine de villages des environs ont pu consulter.

 

« Ce sont plus de 20 000 personnes qui ont reçu une aide médicale pour une maladie mortelle et qui autrement n’auraient jamais été traitées »

 

« La première année où aucun enfant n'est mort de paludisme »

De manière plus significative, on n’a recensé aucun décès dû au paludisme dans les villages où un agent de santé communautaire œuvrait.  « Quand nous avons évalué le projet après les quatre premiers mois d’opération, tous les chefs des villages où le programme avait été instauré sont venus me rencontrer », se souvient Noiseux. « Ils ont tous dit que c’était la première année depuis aussi longtemps qu’on se souvienne qu’aucun enfant n’était mort de paludisme durant la saison des pluies.  Ils ont exprimé toute leur gratitude envers MSF ».

Noiseux attribue le succès du programme à l’accessibilité des soins qu’a rendue possible la présence des agents de santé communautaire dans les villages; cela a permis aux malades de recevoir l'assistance médicale dont ils ont besoin plus rapidement. « De plus, les gens leur font confiance, parce qu’ils viennent de leur communauté », dit-elle.

 

 

Pour Noiseux, qui gérait déjà les activités de sensibilisation médicale de MSF, dont une campagne de vaccination de masse contre la rougeole en tant qu’infirmière communautaire à Kimbi, ces résultats montrent comment on peut faire la différence et sauver beaucoup de vies. « Le paludisme était très répandu et constituait la première cause de décès chez les enfants de moins de cinq ans », dit-elle. « Nous savions qu’il s’agissait d’une urgence à laquelle il fallait réagir ».

Même son propre diagnostic de paludisme n’aura pas réussi à la dissuader de poursuivre le projet. « Quand j’ai découvert que j’avais contracté le paludisme, j’étais en plein milieu d'une formation, et je ne voulais pas l'annuler parce qu'elle était trop importante », dit-elle. « Heureusement, mon assistant Kester a pu en assurer la majeure partie, car même si mes symptômes n’étaient pas très intenses, j’étais incapable de travailler de longues heures ».

Malgré les défis, Noiseux savait également que sa maladie s’accompagnait d’une lueur d'espoir. « Je suis si fière que ce soit l'un de nos agents de santé communautaire qui a pu confirmer mon diagnostic », dit-elle. « C’était de bon augure ».

 

French, Canada
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« J'ai demandé à l'un de mes agents de santé de me montrer comment elle s'y prendrait pour faire le test Bioline. Lorsque nous avons examiné les résultats, elle a dit, « Kim, c'est positif. Vous êtes atteinte de paludisme! »

Kim Danielle NoiseuxInfirmière de MSF
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2015/06/11 - 19:15
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